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Etude de cas absentéisme
Etude de cas absentéisme

Courte étude de cas

Nous sommes dans une PME industrielle d’environ 1000 salariés. L’entreprise est équipée d’un site de production dans lequel il y a une suspicion de sur-absentéisme depuis plusieurs années. Cet absentéisme concerne principalement le motif maladie, les accidents du travail étant à un niveau modéré et même décroissant dans l’entreprise. La production, semi-automatisée, s’effectue en 3x8 par des salariés dont la très grande majorité sont des ouvriers. L’entreprise possède également un centre de recherche où la majorité des salariés ont le statut cadre. La structure des âges semble équilibrée dans l’entreprise, c’est-à-dire qu’une majorité des salariés ont entre 40 et 50 ans avec un effectif plus faible dans des ordres de grandeur identiques en deçà de 40 ans et au-delà de 50 ans. L’entreprise vient d’être rachetée par un fond de pension.

Le DRH rédige un ordre de mission pour comprendre la cause de l’absentéisme pour cause maladie dans l’entreprise. Les travaux produits en interne (notamment sur la base du reporting du contrôle de gestion sociale) et par un cabinet externe n’ont jusqu’à lors pas permis de dégager des causalités claires.

Une analyse statistique de l’absentéisme maladie est menée sur la base des données SIRH de l’entreprise. Ces données ont été préalablement qualifiées et jugées de qualité convenable (taux d’erreur inférieur à 3%). Les premiers taux calculés sont conformes à ceux énoncés par le DRH : l’absentéisme maladie est d’un niveau élevé et il est en hausse

Il apparaît rapidement que le taux d’absentéisme au sein département industriel (celui qui occupe le personnel gérant la production) est effectivement beaucoup plus important (40% supérieur au taux moyen) que dans le reste de l’entreprise, en particulier pour les salariés en CDI.

Plusieurs indicateurs sont ensuite produits pour progresser dans l’analyse. Le but recherché est double, il s’agit d’une part de caractériser aussi précisément que possible la structure de cet absentéisme (durée, fréquence, exposition, saisonnalité, etc.) et d’autre part de rechercher des valeurs et tendances atypiques pouvant conduire à identifier des éléments instructifs. Parmi les nombreux indicateurs produits, l’un d’entre évoque effectivement un phénomène inhabituel. Cet indicateur, très simple à produire, croise le taux d’absentéisme maladie avec l’ancienneté (pour le groupe d’étude). Après une année d’ancienneté, la courbe affiche une croissance régulière.

Il est assez fréquent de constater un taux d’absentéisme maladie lié positivement à l’ancienneté dans les entreprises industrielles. Une hypothèse est que l’usure professionnelle affecte progressivement les organismes, avec pour conséquence des arrêts de durée croissante. La statistique permet d’infirmer ou de confirmer cette augmentation de la durée moyenne des arrêts (qui se confirme ici, ce qui renforce l’hypothèse). Mais dans ce cas, l’indicateur a une autre caractéristique, moins attendue. L’atypisme ici vient du fait que le taux le plus fort est visible pour l’ancienneté égale à 1 an, avant donc que l’usure n’ait pu pénaliser les organismes.

Résumons-nous, l’absentéisme augmente avec l’ancienneté au sein du département industriel dès que l’ancienneté dépasse un an, mais c’est pour cette ancienneté d’un an qu’il est le plus fort. Après vérification des résultants, plusieurs hypothèses sont évoquées concernant ce pic d’absentéisme pour l’ancienneté d’un an, mais aucune ne semble totalement convaincante et digne d’être présentée au DRH.

L’indicateur est alors présenté et discuté au sein d’un comité de pilotage dûment crée lors du lancement du projet. Lors de ce comité de pilotage, un manager opérationnel au sein du département industriel propose rapidement l’explication suivante : « ce phénomène est lié selon moi à notre stratégie de recrutement. Avant d’obtenir le CDI dont la plupart rêvent, nos ouvriers ont écumé les dispositifs temporaires que nous leur proposons (CDD, intérim). Ils font toutes les concessions possibles (horaires décalés, astreintes…) pour faire bonne figure et obtenir le CDI. Une fois ce dernier obtenu, ils savent que la prise en charge totale des absences maladie n’intervient qu’après un an d’ancienneté. Alors ils s’accrochent, puis épuisés, certains décompensent. »

Ce cas illustre la valeur ajoutée et la limite de la statistique. Sans la statistique, l’entreprise n’avait pas réussi à comprendre la cause de ce phénomène (et pour cause, elle ne l’avait pas identifié). Mais l’indicateur seul n’a pas permis non plus d’avancer dans l’analyse causale. La statistique, en raison de sa dimension objective (par opposition aux « idées », souvent l’objet de conflits) a été un PRÉTEXTE à un dialogue social constructif et fécond. C’est ce dernier qui a permis de résoudre le questionnement concernant la cause de l’absentéisme pour cette population.

Taux d'absentéisme avec l'ancienneté


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