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Formation et analytique

Une approche par l’analytique RH

Longtemps rendue secondaire par l’obligation de dépenser, la question du retour sur investissement des actions de formation va devenir rapidement un enjeu majeur. Mais entendons-nous : au-delà de l’évaluation habituelle des apprentissages et des comportements, il va s’agir maintenant d’évaluer l’impact des actions de formation sur des indicateurs concrets de performance.

Une démarche analytique RH semble appropriée pour cet objectif. Elle consiste à identifier un indicateur quantitatif (RH ou de toute autre nature), et à modéliser l’impact d’une ou plusieurs actions de formation sur la valeur prise par cet indicateur.

Pour prendre un exemple simple, nous nous intéressons ici, au sein d’une population d’hôtesses de caisse d’une entreprise de la grande distribution, aux effets de deux actions de formation : une formation « Gestes et Postures »[1] et une autre « Bien-être au travail ». On leur associe un indicateur individuel d’absence (nombre de jours d’absence maladie dans l’année). On peut en effet considérer que ces actions de prévention des troubles musculo-squelettiques et des risques psycho-sociaux visent in fine à éviter que des salariés, de par ces pathologies, perdent en productivité, notamment du fait de leurs absences. Il s’agit probablement d’un raccourci, mais il n’est pas faux et il a surtout l’avantage de conduire à un indicateur simple, fiable et disponible, trois qualités intéressantes pour une démarche analytique RH.

Pour évaluer le ROI de ces deux actions de formation, on modélise alors l’absence (éventuelle) d’une hôtesse de caisse comme fonction d’un ensemble de variables : âge, sexe, niveau de professionnalisme, et… actions de formation. Bien sûr, on ne considère ici que celles qui ont été suivies antérieurement à la période d’observation de l’indicateur d’absence, et dans un délai raisonnable. On espère en effet qu’une action de formation aura des effets qui perdureront dans le temps, même s’il est probable qu’ils diminuent. Ici, par exemple, on s’intéresse à l’absence en 2016, en tenant compte des actions de formation qui ont été suivies entre 2013 et 2016.

Que tire-t-on de cette modélisation ?

Evacuons immédiatement la question des variables démographiques : comme souvent pour les variables d’absence, l’âge, le sexe, le niveau, les absences maladie antérieures (vues comme un indicateur de l’état de santé) ont toutes une influence sur l’absence. Mais quid des actions de formation ?

Pour répondre, il faut distinguer deux types de salariés.

Une majorité de d’hôtesses de caisse (75%) n’ont pas assisté à la formation « Gestes et Postures ». Pour elles, la formation « Bien-être au travail » réduit l’absence (-17%), pour l’équivalent d’une journée de travail dans l’année, pendant au moins les 2 ans qui suivent la formation. La rentabilité économique de la formation n’est donc pas énorme (2 journées « épargnées » moins une journée de formation) mais elle s’apprécie quand même…

L’autre partie des salariés (25%) a, elle, suivi la formation « Gestes et Postures ». Pour eux, la formation  « Bien-être au travail » n’a strictement aucun effet sur l’absence. Le résultat n’était pas attendu mais il n’est pas choquant : les gains associés à 2 actions de formation assez proches dans le thème et dans le temps ne se cumulent pas.

Problème, comme nous l’avons souligné lors de notre précédente chronique, dans les faits, la probabilité de participer à la formation « Bien-être » s’accroît avec la participation préalable à « Gestes et Postures ». L’employeur concentre une part importante de son effort de formation sur une minorité de salariés « cumulards ». Même en supposant qu’il y a une rationalité derrière tout cela (par exemple la volonté de récompenser l’engagement des salariés par la formation), on voit bien que du point de vue de l’efficacité de la formation, cette pratique est inefficace. Les heures de formation au « Bien-être au travail » sont tout simplement dépensées inutilement.

Deux remarques viennent conclure cette première approche de la question stratégique de la mesure du ROI formation.

  • La première, sur le fond, révèle à quel point l’efficacité d’une action de formation est profondément liée au choix de ses bénéficiaires. Une même action de formation peut fort bien, sur deux publics assez peu différents, conduire à des résultats très différents eux, ce qui assurément devrait amener les décisionnaires RH à reconsidérer la question des modalités d’accès à la formation.
  • La seconde souligne l’intérêt d’une démarche analytique RH dans ce projet global d’évaluation du ROI des actions de formation. Sans démarche et outils adéquats, le sujet était devenu l’arlésienne de la fonction.  Elle doit maintenant se saisir de cette opportunité pour accompagner sa mutation d’un « centre de coût » vers un « business partner ».

[1] De son nom « actualisé », « Prévention des Risques liés à l’Activité Physique » (PRAP)


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